Définition : "la citoyenneté en EPS, c'est la capacité à prendre des responsabilités dans un groupe en fonction d'un projet, d'assumer des changements de statuts, d'accepter l'autre sans ses différences, d'agir en respectant des règles et en proposant éventuellement de les modifier."
Problématique : Etant donné la fréquence et l'importance accordée à ce thème dans les textes officielles, il semble que "l'éducation à la citoyenneté" (F. Galichet, 1998) soit actuellement une notion essentielle. Elle entre désormais en ligne de compte aux côtés des apprentissages, des savoirs et de la formation de l'élève.
Point de vue n°1 : L'enseignant d'EPS contribue à l'éducation à la citoyenneté en développant la reconnaissance identitaire. On entend par reconnaissance identitaire, les points communs, les traits caractéristiques de filiation le plus souvent dirigés vers un but commun.
Argument n°1 : En constituant des groupes stables, l'enseignant
renforce le sentiment d'appartenance.
· Preuve empirique :
P. Canivez (1990) "la citoyenneté définit l'appartenance
à un Etat".
· Preuve institutionnelle :
L'enseignant favorise les situations interactives et sait mettre en
place des formes collectives de travail et d'apprentissage. (circulaire
du 23 mai 1997)
· Preuve scientifique :
Les groupes hétérogènes d'affinité peuvent
être intéressants du point de vue des relations socio-affectives
et socio-cognitives qu'ils développent. Effectivement, l'expérience
de Langueville, Cadopi, Winnykamen, Huet (195) montre que les interactions
faiblement dissymétriques ont des effets favorables sur l'apprentissage.
· Preuve didactique :
Par analogie avec l'état de Canivez, le groupe peut constituer
l'entité référence pour l'élève. L'enseignant
peut garder ces groupes ou équipes stables quelque soit l'activité
: échauffement, gym, course d'orientation, sports collectifs…par
exemple, en course d'orientation l'élève qui maîtrise
la relation entre le vu et le représenté va aider celui qui
a des difficultés. Par contre ce dernier peut être plus compétent
à gérer un effort et va guider ses coéquipiers pour
être capable de rechercher toutes les balises.
Argument n°2 : L'enseignant cherche à préparer des
individus motivés par les APSA dans l'optique de leur insertion
future dan les pratiques sociales. (sport, loisirs, entretien…)
· Preuve empirique :
Se comporte comme un citoyen celui qui prenant soin de son corps ne
met pas en danger la vie d'autrui, ni ne pèse par certains abus
sur l'économie générale et les équilibres sociaux.
· Preuve institutionnelle :
Ce citoyen est responsable de la conduite de sa vie corporelle pendant
la scolarité et tout au long de la vie.(arrêté du 9
août 2000)
· Preuve didactique :
P. Granier (1996) affirme que les accidents ont surtout lieu en sports
collectifs. Dés lors, l'échauffement devient un contenu d'enseignement
non négligeable pour éviter les blessures au pied, aux jambes
et aux doigts. Donc, il apparaît intéressant de valoriser
cette partie de la leçon afin de donner aux futurs pratiquants les
connaissances essentielles, à la pratique sportive "sans risque".
· Preuve scientifique :
Toutefois, l'étude en accidentologie en EPS de D. Mestéjanot
(1995) relativise certaines idées reçues et établie
que seulement 0.5% des élèves scolarisés dans le secondaire
se blessent.
Argument n°3 : Négocier les règles avec les élèves
permet de les responsabiliser et donc de tendre vers une citoyenneté
active et participative.
· Preuve institutionnelle :
L'EPS (…) "permet aux élèves d'être acteurs de
leurs pratiques, de prendre des décisions et des responsabilités
et d'occuper des rôles différents." (arrêté du
15 septembre 1998)
· Preuve scientifique :
Strauss (1991) développe l'idée selon laquelle la réflexion
et le dialogue sont nécessaires pour la mise en place, le maintien
et la reproduction des règles. Il définit les négociations
comme des "arrangements informels souvent contradictoires avec les règles
officielles."
· Preuve didactique :
Kugler 1996, constate que les élèves d'un établissement
de la région parisienne sont de mauvais nageurs. Il programme donc
l'activité natation. La première année, il remarque,
après 15 séances, que les résultats ne sont pas probants.
Or ces élèves viennent en EPS pour pratiquer le basket-ball.
Il leur dit : "si vous apprenez en moins de 15 séances, les séances
qui restent seront consacrées à l'activité basket-ball.
Alors, l'efficience est beaucoup plus forte.
Argument n°4 : Cependant l'école participe à l'exclusion.
· Preuve empirique :
Quinze à vingt % des jeunes des pays de l’OCDE quittent l’enseignement
secondaire sans avoir acquis les connaissances et les qualifications requises
pour entrer sur le marché du travail (Étude de l’OCDE sur
l’emploi, 1994).
· Preuve scientifique :
N. Elias repris par F. Dubet estime qu'il y a une intolérance
vis à vis de la violence et que celle ci touche tous les établissements
de l'incivilité à des violences graves ou émeutes.
A J.Y. Rochex d'ajouter qu'il existe une violence de l'école
: échec scolaire et exclusion.
Point de vue n°2 : En s'attachant à la construction personnelle de l'élève, par l'intermédiaire du corps, l'enseignant d'EPS peut le préparer à "une citoyenneté en acte." (arrêté du 9 août 2000)
Argument n°1 : L'accès à tous à une culture
sportive est un facteur de la construction d'une citoyenneté en
acte.
· Preuve institutionnelle :
Programme de 6ième (18 juin 1996) "les APSA permettent à
tous les élèves de s'éprouver physiquement et de mieux
se connaître en vivant des expériences variées et originales."
· Preuve didactique :
Dans le cadre d'un PAE mené tout au long de l'année,
des élèves de 5ème d'une classe de SEGPA ont organisé,
préparé une sortie sur des chemins de forêt. Cette
sortie de 4 jours alternait randonnée et VTT. De cette expérience,
il ressort que les élèves ont été sensibilisé
à l'apprentissage de la vie de groupe, au respect de l'environnement.
L'un deux lance : "Avant de partir, souvent on se battait, maintenant on
est tous copains." Ils parlent de solidarité, de nature, d'effort
physique, de fierté d'être aller au bout. Il convient de préciser
que ces commentaires proviennent des élèves. La réalité
semble toutefois moins "idéale".
Par l'intermédiaire d'APSA du groupement APPN, des élèves
en difficultés ont pu accéder à une culture sportive
(le VTT) et toucher concrètement des valeurs citoyennes.
Argument n°2 : Développer les capacités de jugement
et éveiller au sens critique constitue un autre élément
de la construction d'une citoyenneté en acte.
· Preuve institutionnelle :
Programme de 3ème (arrêté du 15 septembre 1999)
"l'EPS est l'occasion de porter un regard critique sur les APSA (…)"
· Preuve didactique :
Dans l'activité acrosport, activité collective à
visée esthétique et artistique, cette citoyenneté
peut se traduire au travers d'opérations (règles d'actions)
comme être critique vis à vis du règlement en proposant
de nouvelles figures, de nouveaux portés, en portant un jugement
de valeur sur un enchaînement, en fonction de critères sélectionnés
au préalable en concertation entre les élèves et le
professeur.
Chaque élève s'implique et devient critique par rapport
à la règle.
Argument n°3 : L'interdisciplinarité (mise en relation de
savoirs de plusieurs disciplines) permet la construction personnelle de
l'élève en donnant un sens au apprentissages.
· Preuve scientifique :
A. Davisse (1996) "ce qui socialise, c'est d'apprendre quelque chose
qui vaille le respect de la règle et de ses contraintes." Les contenus
disciplinaires sont à cet égard disciplinant (…) En ce sens
le choix des contenus devient essentiel.
· Preuve institutionnelle :
La charte des programmes (1992) propose une réflexion sur les
finalités, une sélection des savoirs disciplinaires, une
articulation des objectifs de connaissances et objectifs de socialisation
(…) si l'on ne veut pas que les apprentissages scolaires soient leur propre
fin mais qu'ils débouchent sur un réinvestissement hors du
monde scolaire (…).
· Preuve didactique :
Coasne (revue EPS n°219) Les élèves préparent,
organisent et jugent une compétition de GR. En math, étude
des déplacements (trajectoire du centre de gravité de la
massue par exemple), en musique, étude du rythme, en EPS, l'enseignant
et les élèves utilisent ces connaissances pour construire
les enchaînement et déterminer les critères d'évaluation.
Point de vue n°3 : L'enseignant développe des attitudes citoyennes par la modifications des comportements.
Argument n°1 : L'éducation à la citoyenneté
passe par la modification des comportements par rapport aux règles.
· Preuve institutionnelle :
Programme du cycle central (1997) "l'intégration de la nécessité
de la règle reste un objectif du cycle central."
· Preuve empirique :
La conformation à la règle n'est pas l'éducation
à la règle. En sport collectif, on ne s'approprie pas la
règle, on la respecte ou on la contourne.
· Preuve didactique :
Méard et Morales (Les cahiers pédagogiques n°361,
1998) proposent de créer un jeu collectif, le teck-ball. Pendant
l'élaboration du jeu les objectifs sont négociés pour
que la règle permette le jeu. On introduit la règle quand
un problème de rapport de force apparaît ou quand elle apparaît
nécessaire.
· Preuve scientifique :
Pour reprendre l'expression de F. Galichet (1998), il semble donc nécessaire
de "rendre la loi désirable."
Argument n°2 : L'éducation à la citoyenneté
passe par la modification des comportements par rapport aux autres.
· Preuve institutionnelle :
Programme de 6ième (1996) "est privilégié ce qui
permet au plan des relations à autrui d'éprouver sa volonté
de vaincre dans le respect de l'adversaire, d'accepter la décision
d'un arbitre ou d'un juge."
· Preuve scientifique :
Gibbons et Ebbeck (1997) montrent que la nature des apprentissages
est liée aux stratégies d'enseignement. En effet, leur expérience
compare un groupe contrôle où l'apprentissage des habiletés
techniques au basket-ball est recherché, et un groupe où
l'on vise à parfaire leur développement moral, notion de
fair-play. Les résultats font émerger que des progrès
significatifs ont lieu dans le groupe contrôle au niveau des habiletés
motrices et qu'une large progression s'opère au niveau des attitudes
dans l'autre groupe. Que peut-on en conclure ?
Tout d'abord on peut avancer que le fair-play "s'enseigne." Mais surtout
que l'enseignant ne peut pas poursuivre tous les objectifs de front. Certains
apprentissages s'effectuent au détriment d'autres. L'enseignant
est donc "contraint" à faire des choix.
· Preuve didactique :
Au collège de Chanteloup (Revue Hyper n°202, 1998), dans
une classe sport, un système de sanction basé sur le modèle
des cartons du football est instauré. Ce système est aussi
bien applicable aux comportements sportifs (en cours de pratiques sportives)
qu'aux comportements généraux.
Par ce moyen, on tente de rendre concret et signifiant le respect,
l'écoute, la tolérance, le fair-play, la solidarité,
de participer à la lutte contre la violence.
Argument n°3 : L'éducation à la citoyenneté
passe par la modification des comportements par rapport à l'environnement.
· Preuve empirique :
Etre citoyen c'est, être concerné, participer, apporter
sa contribution à la société école (B. Defrance,
Education à la citoyenneté, 1996) pour que le cursus scolaire
ne soit pas un parcours d'obstacles mais soit davantage ressentit comme
une expérience positive..
· Preuve didactique :
L'éducation à la citoyenneté n'est pas juxtaposées
à ses contenus. En effet il ne suffit pas de ranger le matériel
pour dire qu'ils sont citoyens. Car certains considéreraient cela
comme dégradant ou comme une collaboration à l'ennemi. Par
contre, on peut former des groupes responsables d'une partie du matériel.
Donc gérer son propre matériel s'inscrit dans une étape
dans le cadre d'une progression.