FICHE TYPE 2
LE PLAISIR, LA MOTIVATION

I )  DEFINITION :

a)  La motivation :

«Le concept de motivation représente le construit hypothétique utilisé afin de décrire les forces internes et\ou externes produisant le déclenchement, la direction, l’intensité et la persistance du comportement .» (VALLERAND et THILL 1993 )

DURAND en 1987, ajoute et distingue trois besoins :
- Besoin d’accomplissement : besoin de réaliser des tâches difficiles, tendance à rechercher du succès.
- Besoin d’affiliation : incite à établir des contacts et à rechercher des relations affectives avec autrui.
- Besoin hédonique : correspond à la recherche du plaisir.

RYAN & CONNELL en 1989, distinguent différentes orientations motivationnelles
- Contrôle externe (comportement initié par une récompense externe )
- Introjection (action contrôlée par des règles que l’élève a lui-même instaurées)
- Identification (actions répondant à un double investissement, sur les actions elle-même et sur les bénéfices qui leur sont associés)
- Contrôle intrinsèque ( Les actions intrinsèquement motivées sont mises en œuvre pour l’amusement et/ou le plaisir qu’elles procurent)

NICHOLLS identifie deux sortes de buts motivationnels :
- But de maîtrise (implication de l’ego)
- But de comparaison sociale (compétition)

b)  Le Plaisir :

« État affectif lié à la satisfaction d’un désir, d’un besoin, d’une inclination; sensation, sentiment agréable volonté arbitraire. » (Dictionnaire Hachette 2000)

A. DAVISSE (2000) : « Il est sans doute aisé de motiver les élèves mais il n’est pas pour autant facile de faire saisir qu’au delà du plaisir immédiat, il y a à apprendre quelque chose par l’appropriation de règles constitutives de l’activité. »

P.MEIRIEU (2001) : « On ne veut pas d’une école où les élèves font ce qu’ils veulent mais où ils veulent ce qu’ils font .»
 

II)  HISTORIQUE :

-Le pédagogue et médecin belge Ovide DECROLY ( début 20ème s ) tenait pour sa part l’apprendre comme un besoin parmi d’autre. L’enseignant , à son estime, se doit d’encourager ou de « diriger les besoins innés » ou acquis propres à chaque enfant ou adulte, et d’en faire naître de nouveaux.

-C. HULL 1940 ( éthologue à Yale ) propose une loi scientifique d’après une expérience menée avec des souris :
Apprentissage = Motivation x Habitude
Formule que l’on pourrait ainsi amender :
Motivation = Besoin x Intérêt
Pour lui la motivation est toujours le résultat – du moins en première approximation – de l’interaction entre l’état interne d’un individu et de multiples éléments de son environnement.

-Pour B. SKINNER 1950 ( behavioriste ) un élève se démotive à la suite d’échecs fréquents. Des stimuli extérieurs, tel des activités, des récompenses ou des encouragements sont à rechercher pour déclencher une irrésistible envie d’apprendre et mobiliser de l’énergie. Enseigner est l’art d’identifier ces facteurs déclenchants.

-A l’opposé dans les années 60, le philosophe C. ROGERS et les pédagogues des courants humanistes ont estimé que la véritable source de motivation résidait dans les besoins intrinsèques de l’individu. La libido sciendi procède du besoin de s’épanouir.

-D’un point de vue constructiviste, la motivation serait logée dans une relation permanente entre l’élève et son environnement. Celle ci prend son origine dans les perceptions et les attentes d’individu.
La motivation ne peut se résoudre en termes de recettes. C’est un délicats dosage qu’il s’agit d’organiser. Ce qui importe c’est de susciter un intérêt porteur qui incite l’individu à se surpasser.

III)  LES TEXTES OFFICIELS :

a)  Programme du cycle adaptation, du 18 juin 1996 :

« Les élèves qui entrent en classe de 6ème présentent globalement quelques traits caractéristiques particulièrement sollicités par les pratiques physiques :
- le désir d’agir, en vue d’un plaisir et d’un résultat immédiats.
- …
- le retentissement affectif intense suscité par leur engagement dans l’action physique. De nombreuses activités physiques provoquent une mise à l’épreuve de l’élève lors de l’affrontement des obstacles du milieu physique ou de l’interaction motrice avec autrui. Cette sollicitation déclenche de profondes émotions qui peuvent devenir des stimulants favorables à la motivation et au progrès. »

b)  Programme du cycle central, du 10 janvier 1997 :

« L’enseignant, à ce stade de la scolarité, s’efforce de suivre l’évolution des élèves et veille au maintien de leur engagement personnel – et du plaisir qu’ils en éprouvent -  ainsi qu’à l’affirmation de leurs compétences. »
 
c)  Programme du lycée, du 31 Août 2000 :

- Objectif : « apprendre à s’engager dans l’activité, à prendre des risques et contrôler leur engagement .»
- Enseignement de détermination : « il s’adresse aux élèves qui ont choisi de diversifier et d’approfondir leur pratique et leur connaissance des APSA, cependant les élèves ont des motivations différentes quant à leur temps de pratique et de leur besoin d’où l’intérêt de cet enseignement polyvalent plus que spécialisé. »

d)  Mission du professeur, du 23 Mai 1997 :

«  Créer les conditions favorables à la réussite de tous, permettre la construction de projet personnel de l’élève, susciter et prendre en compte les observations et les initiatives des élèves. »

e) Le collège des années 2000 (BO du 23/06/99, réalisé par Ségolène ROYAL)

Les enseignants doivent « diversifier les méthodes d’enseignement pour aiguiser l’appétit d’apprendre et accompagner la conquête de l’autonomie ».
 

IV) REPRESENTATIONS SOCIALES :

V) PROPOSITIONS D’AUTEURS :

a) CHAMPAGNOL4 1976 : Relations entre difficulté de la tâche, la motivation et les émotions de l’acteur. Cette relation ne serait pas uniforme, prenant la forme d’une courbe en U renversé.
 
 b) Ainsi que le souligne M. DURAND 1991 à propos d’une revue de travaux, « attribuer le succès à une cause interne, stable et contrôlable s’accompagne d’un accroissement de la motivation », dans le sen de ce type de sentiment.

 c) L’enseignant d’EPS devra être sensible à la necessité de jouer sur la complexité (dimension structurelle ) et la difficulté ( dimension fonctionnelle des tâches motrices qu’il planifie.
Clarté du but et des sous buts déclencheurs et guides de l’action (CHATILLON 1985)5 semblent s’imposer à ce niveau.
L’intérêt de ceci réside dans la création d’auto-évaluation par une connaissance des résultats dont GEORGES C (1983)6 dans le cadre de travaux en psychologie cognitive, souligne les fonctions informationnelles et motivationnelles.
 

d)  Le plaisir constitue un élément favorable au maintien de la motivation :
DISHMAN, SALLIS et ORENSTEIN en 1985, ont montré que chez les adultes, les préoccupations de santé peuvent motiver la participation à un programme d’activité physique au départ, mais qu’à terme le sentiment de bien-être et de plaisir sont nécessaires pour que la participation soit maintenue.
Il est probable que le souci de santé est absent chez l’enfant qui s’engage par simple plaisir, renforcement social et autre gratification plus immédiatement tangible.

TELEMA & SILVENOINEM en 1979, révèlent dans leurs recherches que les motivations dont l’importance décroît le plus avec l’âge sont celles liées à la « performance », au « succès sportif » et à la « conception normative de la santé ». Par contre, les motifs demeurant constants avec l’âge sont « l’expérience du loisir et de la relaxation », « faire de l’exercice en plein air » et « se sentir en forme ».

e)  Relation entre but motivationnel individuel et le plaisir ressenti :
DUDA, FOX, BIDDLE et ARMSTRONG en 1992, ont montré que les enfants rapportent un plus haut niveau de plaisir général à pratiquer le sport s’ils ont un but d’accomplissement visant à l’amélioration personnelle et au contrôle de la tâche et s’ils considèrent le succès sportif comme principalement lié à l’effort et à la coopération.
Inversement, le plaisir n’est pas lié à une conception du succès en terme de démonstration de supériorité sur autrui ou de victoire.

f)  Relation entre but motivationnel du groupe classe et plaisir ressenti :
GOUDAS & BIDDLE ont mis en évidence  que les élèves qui considèrent qu’il y a dans leur classe un fort climat de maîtrise ressentent un plaisir plus élevé que ceux qui perçoivent leur classe avec un climat de performance. De plus, un niveau élevé de plaisir est rapporté par les sujets qui perçoivent le climat de leur classe comme exclusivement de maîtrise ou à la fois de maîtrise et de performance.
Rq : « L’amusement » est étroitement lié à une condition « d’excitation » et de « plaisir » corrélé souvent à la présence des autres.

g)  Influence de la contrôlabilité de l’environnement sur le plaisir et la motivation :
Selon la contrôlabilité de l’environnement, c’est à dire selon la relation que l’élève établit entre son comportement et une modification de l’environnement, on remarque des comportements d’investissement et de satisfaction ou bien des comportements de résignation.
DECI & RYAN en 1985,  montrent que la perception du contrôle est plus importante que la récompense perçue en ce sens et que cette dernière n’est associée à la motivation intrinsèque et au plaisir que lorsque l’individu considère qu’il a un contrôle personnel  sur ses actions.
SELIGMAN en 1967, expérimente sur des chiens et met en évidence que s’ils n’ont pas de prise sur l’environnement, ils ne cherchent plus à agir sur l’environnement (découragement puis résignation).
DWECK en 1973 et ERLICH en 1989 mettent en évidence, chez les enfants, des résultats similaires.
D’où l’importance du contrôle personnel de l’élève sur ses actions.

h) Selon YERKES et DODSON 1908, l’activation  déterminant le degré de motivation et d’investissement  de l’élève dans une activité, serait néfaste à la performance au delà d’un certain seuil (image d’une courbe en U renversée)
 
 i) En 1975 DECI affirme l’existence d’un conflit entre la motivation intrinsèque (MI) et extrinsèque (ME).
ROBERTS 1990, montre qu’il y a 2 orientations : Les représentations de ses compétences compétitives et celles de maîtrise.
L’élève s’investie pour faire la démonstration de ses compétences (MI) et ne s’investie pas pour ne pas montrer qu’il est «  incompétent ». Le climat motivationnel de la classe pouvant influencer son investissement (ME).

VI) FACTEURS QUI JOUENT SUR LA NOTION :

a) Motivation et Apprentissage :

L’apprentissage est une transformation des comportements dans un sens de progrès qui est dû à l’interaction du sujet avec son environnement physique et\ou humain.
Cette transformation doit être durable, stable, et se traduit par une réalisation plus économique au plan énergétique et\ou au plan attentionnel.
-proposer un problème moteur c’est à dire quelque chose que l’élève ne sait pas encore faire.
-la difficulté doit être optimale
-quantité de répétition importante, motivation, persistance
-investissement suffisant

A partir de cela lorsqu’on met en relation motivation et apprentissage dans des situations d’accomplissements, on constate chez les élèves 2 grands types de comportements.
-comportements adaptatifs
-comportements non-adaptatifs
 
 

Variables comportementales Comportement adaptatif Comportements non adaptatif
Direction Tâches difficultés optimalesRecherche des informations pertinentes Tâches faciles ou tâches trop difficilesOu rejet des informations
Intensité Effort important Peu d’effort
Persistance Acharné face aux obstacles Fuites devant la difficulté
« Motivation continuée » Continue la pratique hors de l’école ( AS ) Ne pratique pas hors de l’ école

CONCLUSION :

Repérer les stratégies chez les élèves peut aider l’enseignant d’EPS à expliquer pourquoi ils agissent de telle ou telle façon et ainsi peut organiser son enseignement en fonction des caractéristiques de ses élèves.
 

b) Motivation et effort :

L’EPS est la seule discipline où l’effort n’est pas uniquement un moyen mais un objectif en soi : « acquérir le sens de l’effort, affirmer sa personnalité par le sens de l’effort physique » ( B.O n°10 et 15 octobre 1998 ).

Les déterminants psychologiques de l’effort sont associés à la motivation car l’effort est associé à la durée de l’action , l’effort sous entend un investissement à long termes.

Les élèves acquièrent le goût de l’effort quand le professeur a suscité un désir fort et qu’il leur fait comprendre et admettre l’utilité de celui-ci pour assouvir ce désir :

Illustrations :
-auto-évaluation associé à la définition de projet personnel
-évaluation formative par la construction et l’appropriation des critères de réussite et\ou de réalisation par les élèves

c) Causes essentielles du plaisir en EPS :

GOUDAS & BIDDLE en 1993, ont évalué l’opinion des élèves. Les résultats montrent que les facteurs « santé », « forme physique »et « changement par rapport au travail scolaire normal » contribuent essentiellement à rendre cette matière agréable.
 

VII) FAITS ET AFFIRMATIONS

a) GOUDAS & BIDDLE2 en 1993, ont évalué l’opinion des élèves. Les résultats montrent que les facteurs « santé », « forme physique »et « changement par rapport au travail scolaire normal » contribuent essentiellement à rendre cette matière agréable.

 b) Enquête lycée de B BEUNARD : « Que pensent les lycéens de l’EP ?» (R EPS n°280, 1999)
Les motivations/non motivation pour l’EPS ont fait l’objet d’une question ouverte : “près d’1 lycéen sur 4 (24,4%) exprime une motivation centrée sur le plaisir, le jeu et le défoulement.”
« C’est la dimension ludique de l’activité et sa fonction de divertissement qui est la première pour les élèves interrogés. Ce qui n’entache en rien la valeur éducative de la discipline (on peut apprendre en jouant, ne l’oubliant pas !).
B BEUNARD (Article déjà cité) met en évidence que « les motivations actuelles des élèves baignant dans cette mentalité ludique et hédoniste risquent fort d’être en rupture avec les propositions de l’école, porteuse majoritairement d’une logique traditionnelle, linéaire, compétitive ».

B BEUNARD (Article déjà cité) : « Ce qui ne signifie en rien que l’enseignant doit coller à cette mode du « butinage » sportif et du plaisir immédiat centré de manière élective sur la vitesse ou le risque. Connaître et prendre en compte les goûts et les dégoûts de nos élèves nous paraît pédagogiquement aussi primordial que la nécessité de les faire évoluer, de les dépasser, d’en apprécier de nouveaux ou d’en reconnaître d’anciens comme celui de l’effort et du plaisir différé de la victoire sur soi. »

  B BEUNARD (Article déjà cité) évoque que la pénurie d’installation et de matériel pour la pratique de l’EPS entraîne l’absence de possibilités offertes aux élèves en matière de choix d’activités. Ce qui constitue un motif principal de désintérêt. Ainsi, à l’inverse, l’innovation pédagogique constitue un motif de motivation.

 Il énonce également l’évolution des mentalités actuelles du loisir sportif (en citant J DUMAZEDIER : « Sociologie empirique du loisir », 1974) qui fait apparaître la mode des sports dits « californiens », « fun », de « glisse » dans le champ des pratiques sociales qui privilégie la découverte, l’émotion, le plaisir et la convivialité (plutôt que le perfectionnement, l’effort et la compétition).
La pratique d’activité nouvelle pour les adolescents contribue à élever leur curiosité et par conséquent leur motivation. Par exemple, en 6ème, on privilégiera l’acrogym à une gymnastique plus traditionnelle.

c) A PITHON : « La course contre la montre par équipe » (R EPS n°184, 1983)
L’objectif de ce cycle de demi-fond sur piste au collège est de permettre aux élèves d’améliorer leurs qualités physiques mais aussi de maintenir intacte leur motivation pour le demi-fond. Ainsi , les problèmes que les élèves « ont à résoudre sont à la fois différents et nouveaux ( exemple : courir en groupe, choix tactiques …), ce qui doit maintenir leur intérêt pour l’activité proposées.»