FICHE ARGUMENTAIRE N°3

LE PLAISIR, LA MOTIVATION


La motivation
«Le concept de motivation représente le construit hypothétique utilisé afin de décrire les forces internes et\ou externes produisant le déclenchement, la direction, l’intensité et la persistance du comportement .» (VALLERAND et THILL 19931 )

Le plaisir
« État affectif lié à la satisfaction d’un désir, d’un besoin, d’une inclination; sensation, sentiment agréable volonté arbitraire. » (Dictionnaire Hachette 2000)
 

POINT DE VUE 1
Le plaisir a des effets positifs sur la motivation et donc sur l’apprentissage

Argument favorable
Le plaisir est favorable et conditionne la motivation en vue d’un apprentissage et d’un progrès de l’élève

Preuves scientifiques
 a) DISHMAN, SALLIS et ORENSTEIN2 en 1985, ont montré que le plaisir est nécessaire pour que la motivation se maintienne.
Chez les adultes, les préoccupations de santé peuvent motiver la participation à un programme d’activité physique au départ, mais à terme le sentiment de bien-être et de plaisir sont nécessaires pour que la participation soit maintenue.
Chez l’enfant, Il est probable que le souci de santé soit absent et qu’il s’engage par simple plaisir, renforcement social et autre gratification plus immédiatement tangible.

 b) TELEMA & SILVENOINEM2 en 1979, PERRIN3 C. 1993 montrent que les motivations qui se maintiennent le plus avec l’âge sont liées au plaisir.
Ils révèlent dans leurs recherches que les motivations dont l’importance décroît le plus avec l’âge sont celles liées à la « performance », au « succès sportif » et à la « conception normative de la santé ». Par contre, les motifs demeurant constants avec l’âge sont « l’expérience du loisir et de la relaxation », « faire de l’exercice en plein air » et « se sentir en forme ».

Preuves institutionnelles
 a) Programme du cycle adaptation, arrêté du 18 juin 1996
« Cette sollicitation (de l’élève) déclenche de profondes émotions (notamment le plaisir) qui peuvent devenir des stimulants favorables à la motivation et au progrès. »

b) Programme du cycle central, arrêté du 10 janvier 1997
« L’enseignant, à ce stade de la scolarité, s’efforce de suivre l’évolution des élèves et veille au maintien de leur engagement personnel – et du plaisir qu’ils en éprouvent -  ainsi qu’à l’affirmation de leurs compétences. »

Preuves empiriques
 a) GOUDAS & BIDDLE2 en 1993, ont évalué l’opinion des élèves. Les résultats montrent que les facteurs « santé », « forme physique »et « changement par rapport au travail scolaire normal » contribuent essentiellement à rendre cette matière agréable.

 b) Enquête lycée de B BEUNARD : « Que pensent les lycéens de l’EP ?» (R EPS n°280, 1999)
Les motivations/non motivation pour l’EPS ont fait l’objet d’une question ouverte : “près d’1 lycéen sur 4 (24,4%) exprime une motivation centrée sur le plaisir, le jeu et le défoulement.”
« C’est la dimension ludique de l’activité et sa fonction de divertissement qui est la première pour les élèves interrogés. Ce qui n’entache en rien la valeur éducative de la discipline (on peut apprendre en jouant, ne l’oubliant pas !).
 
 
 

Argument défavorable
Le plaisir et certaines formes de motivation peuvent être néfastes à l’apprentissage

Preuves empiriques
 B BEUNARD (Article déjà cité) met en évidence que « les motivations actuelles des élèves baignant dans cette mentalité ludique et hédoniste risquent fort d’être en rupture avec les propositions de l’école, porteuse majoritairement d’une logique traditionnelle, linéaire, compétitive ».

Preuves scientifiques
 a) Selon YERKES et DODSON 1908, l’activation  déterminant le degré de motivation et d’investissement  de l’élève dans une activité, serait néfaste à la performance au delà d’un certain seuil (image d’une courbe en U renversée)
 
 b) En 1975 DECI affirme l’existence d’un conflit entre la motivation intrinsèque (MI) et extrinsèque (ME).
ROBERTS 1990, montre qu’il y a 2 orientations : Les représentations de ses compétences compétitives et celles de maîtrise.
L’élève s’investie pour faire la démonstration de ses compétences (MI) et ne s’investie pas pour ne pas montrer qu’il est «  incompétent ». Le climat motivationnel de la classe pouvant influencer son investissement (ME).

 c) GOUDAS & BIDDLE2 ont mis en évidence  que les élèves qui considèrent qu’il y a dans leur classe un fort climat de performance ressentent un plaisir moins élevé que ceux qui perçoivent leur classe avec un climat de maîtrise .
De plus, un niveau élevé de plaisir est rapporté par les sujets qui perçoivent le climat de leur classe comme exclusivement de maîtrise ou à la fois de maîtrise et de performance.
Rq : « L’amusement » est étroitement lié à une condition « d’excitation » et de « plaisir » corrélé souvent à la présence des autres.
 

POINT DE VUE 2
L’innovation pédagogique influence positivement  la motivation et le plaisir des élèves

Argument  favorable :
 En prenant en compte l’évolution des mentalités actuelles du loisir sportif ou les innovations pédagogiques les enseignants  peuvent influencer la motivation et le plaisir des élèves.

Preuves didactiques
 A PITHON : « La course contre la montre par équipe » (R EPS n°184, 1983)
L’objectif de ce cycle de demi-fond sur piste au collège est de permettre aux élèves d’améliorer leurs qualités physiques mais aussi de maintenir intacte leur motivation pour le demi-fond. Ainsi , les problèmes que les élèves « ont à résoudre sont à la fois différents et nouveaux ( exemple : courir en groupe, choix tactiques …), ce qui doit maintenir leur intérêt pour l’activité proposées.»

Preuves empiriques
a) B BEUNARD (Article déjà cité) évoque que la pénurie d’installation et de matériel pour la pratique de l’EPS entraîne l’absence de possibilités offertes aux élèves en matière de choix d’activités. Ce qui constitue un motif principal de désintérêt. Ainsi, à l’inverse, l’innovation pédagogique constitue un motif de motivation.

b) Il énonce également l’évolution des mentalités actuelles du loisir sportif (en citant J DUMAZEDIER : « Sociologie empirique du loisir », 1974) qui fait apparaître la mode des sports dits « californiens », « fun », de « glisse » dans le champ des pratiques sociales qui privilégie la découverte, l’émotion, le plaisir et la convivialité (plutôt que le perfectionnement, l’effort et la compétition).

c) La pratique d’activité nouvelle pour les adolescents contribue à élever leur curiosité et par conséquent leur motivation. Par exemple, en 6ème, on privilégiera l’acrogym à une gymnastique plus traditionnelle.

Preuves institutionnelles
 a) Mission du professeur exerçant en collège, en Lycée EGT ou LP, circulaire du 23/05/97) :
« Il pourra ainsi se comporter en acteur du système éducatif et favoriser son adaptation en participant à la conception et la mise en œuvre d’innovation, de nouveaux dispositifs, de nouveaux programmes et diplômes. »

 b) Le collège des années 2000 (BO du 23/06/99, réalisé par Ségolène ROYAL)
Les enseignants doivent « diversifier les méthodes d’enseignement pour aiguiser l’appétit d’apprendre et accompagner la conquête de l’autonomie ».

Argument qui relativise :

L’innovation pédagogique ne doit pas faire de l’ombre aux procédés pédagogiques toujours valables et utiles pour élever la motivation et le plaisir des élèves.
 
Preuves didactiques :
B BEUNARD (Article déjà cité) : « Ce qui ne signifie en rien que l’enseignant doit coller à cette mode du « butinage » sportif et du plaisir immédiat centré de manière élective sur la vitesse ou le risque. Connaître et prendre en compte les goûts et les dégoûts de nos élèves nous paraît pédagogiquement aussi primordial que la nécessité de les faire évoluer, de les dépasser, d’en apprécier de nouveaux ou d’en reconnaître d’anciens comme celui de l’effort et du plaisir différé de la victoire sur soi. »
 

POINT DE VUE 3
L’enseignant d’EPS ne peut faire l’économie de la connaissance des savoirs relatifs à la motivation et ceux relatifs aux élèves

Argument favorable
Les savoirs scientifiques aident l’enseignant à comprendre et à motiver les élèves.

Preuves scientifiques
 a) CHAMPAGNOL4 1976 : Relations entre difficulté de la tâche, la motivation et les émotions de l’acteur. Cette relation ne serait pas uniforme, prenant la forme d’une courbe en U renversé.
 
 b) Ainsi que le souligne M. DURAND 1991 à propos d’une revue de travaux, « attribuer le succès à une cause interne, stable et contrôlable s’accompagne d’un accroissement de la motivation », dans le sen de ce type de sentiment.

 c) L’enseignant d’EPS devra être sensible à la necessité de jouer sur la complexité (dimension structurelle ) et la difficulté ( dimension fonctionnelle des tâches motrices qu’il planifie.
Clarté du but et des sous buts déclencheurs et guides de l’action (CHATILLON 1985)5 semblent s’imposer à ce niveau.
L’intérêt de ceci réside dans la création d’auto-évaluation par une connaissance des résultats dont GEORGES C (1983)6 dans le cadre de travaux en psychologie cognitive, souligne les fonctions informationnelles et motivationnelles.
 
Argument défavorable
La réalité quotidienne montre que en dépit des efforts de planification de son intervention et d’anticipation des conduites probables, l’enseignant se trouve confronté à l’imprévisibilité subjective de l’apprenant.

Preuves scientifiques
Il semble que la lecture de la tâche par l’élève, et sa motivation à apprendre, soient tributaires d’un ensemble de représentations
a) D’après CHAMBON M7 il subsiste dans les représentations des parent d’élèves (et par là-même de leurs enfants), une association de l’EPS au jeu, au défoulement, ce qui dans l’équilibre des tensions quotidiennes est positif, mais s’oppose parfois aux finalités d’apprentissage entraînant momentanément un inconfort.

b) Codage sexuel des APS et motivation. « dispositions corpo-culturelles conformes au groupe d’appartenance » (BOURDIEU P 1961)8
 
 
 

1 : Introduction à la psychologie de la motivation 1993
2 : Revue enfance (HS n°2 ,3) 1994
3 : Revue STAPS n°30 1993
4 : Revue française de pédagogie 1976
5 : La psycho-pédagogie des APS 1985
6 : Apprendre par l’action 1983
7 : Revue française de pédagogie 1990
8 : La Distinction 1961